
Michel Fugain à la Salle Poirel : une leçon de vie, d’amour et de musique
Hier soir, vendredi 18 avril 2025, la Salle Poirel a accueilli un moment rare, suspendu dans le temps. Michel Fugain, 83 ans, a offert aux Nancéiens un concert vibrant d’humanité, dans le cadre de sa tournée anniversaire intitulée La Vie, l’Amour, etc…, célébrant ses 60 ans de carrière. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que l’artiste n’a rien perdu de sa verve, de sa générosité ni de cette énergie qui a toujours fait de ses spectacles une fête.
Accompagné de cinq musiciens d’une redoutable précision — Bruno Caviglia à la guitare, Yvan Della Valle au clavier, Enrico Mattioli à la basse, Régis Sévignac à la batterie, et sa compagne Sanda aux chœurs — Michel Fugain a embarqué la salle dans une traversée autant musicale qu’émotionnelle. Deux heures de concert sans fioriture, avec pour seul luxe cette sincérité désarmante qui l’a toujours distingué des autres.
Le répertoire, soigneusement choisi, oscillait entre tubes intergénérationnels comme Une belle histoire, Fais comme l’oiseau, Je n’aurai pas le temps, et morceaux plus introspectifs ou méconnus, portés par des textes d’une grande justesse.
Mais au-delà des chansons, ce sont les prises de parole de l’artiste qui ont profondément marqué le public. Entre deux morceaux, Michel Fugain s’autorise des digressions philosophiques, parfois mordantes. Ainsi, lorsqu’il évoque les évolutions techniques du monde moderne, il lance avec un clin d’œil :
« Ici, pas d’intelligence artificielle ! Vous ne l’auriez même pas remarquée… Ici, que des produits naturels ! On est un peu au CERN… mais bio ! »
Une manière joyeusement ironique de réaffirmer l’importance du vivant, de l’imprévu, du lien direct entre les artistes et le public.
Il partage aussi des souvenirs de sa vie d’auteur-compositeur, notamment sa rencontre avec Pierre Delanoë, le célèbre parolier :
« Il m’a appris la rigueur des mots. Pierre, c’était un artisan. Il m’a dit un jour : ‘Une chanson, c’est une émotion qu’on emballe avec soin.’ Je n’ai jamais oublié ça. »
Plus tard, le ton devient plus intime. Fugain parle de la perte d’êtres chers, de ses doutes, de ses départs — y compris de son retrait volontaire du système après l’époque du Big Bazar.
« J’ai connu le succès, la joie, les troupes, les ruptures… et même le silence. Ce silence qu’on choisit ou qu’on subit. Et puis, un jour, on revient. Parce que la scène, c’est un besoin. »
La soirée est aussi marquée par un très beau moment de complicité sur scène avec sa femme Sanda. Seule au micro, elle lui dédie avec douceur la chanson Pour lui. Le public retient son souffle, touché par cette déclaration d’amour en musique, offerte sans ostentation mais avec une émotion palpable. Un instant suspendu, où la tendresse l’emporte sur tout.
Mais plus qu’un simple concert de “variété française”, cette soirée avait des allures de testament joyeux. Michel Fugain ne chante pas la nostalgie, il célèbre la continuité. Il évoque ses débuts, bien sûr — le Big Bazar n’est jamais loin — mais toujours avec ce regard porté vers l’avenir, vers le public, vers la transmission. C’est là toute la force du spectacle : cette capacité à lier les époques, à rassembler les générations dans une même émotion.
Parmi les spectateurs, Célestine et Mathéo, respectivement 18 et 21 ans, témoignent avec tendresse de leur lien au chanteur :
« On a grandi avec ça à la maison, explique Célestine. Mon père est fan de chanson française et il a tous les vinyles. Michel Fugain, pour lui, c’est un peu l’artiste engagé, de gauche, un hippie… ».
Mathéo renchérit : « Même si on n’a pas de souvenirs directs liés à ses chansons, elles nous rappellent l’enfance. Et encore aujourd’hui, on écoute beaucoup le Big Bazar. Ça reste joyeux, collectif, festif… Fugain, pour nous, c’est un peu comme le premier barbecue du printemps : on sort le vinyle et on le met sur la platine. C’est la fête. »
Dans une Salle Poirel pleine à craquer, les spectateurs ont tour à tour ri, pleuré, chanté, et offert à l’artiste plusieurs standing ovations. Car au fond, ce que Michel Fugain nous a rappelé, c’est que l’art n’a pas d’âge. Que tant qu’il y aura des gens pour écouter, il y aura des raisons de chanter.
Et lui, Michel, continuera — tant que la scène l’appelle, tant que l’amour du public lui donne des ailes.
Photos et article : Bruno Dandeu
Les photos sont sur notre page FB
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